Anticonditionnel. [Libre]

La forêt ne faisait plus aucun bruit. Plus aucun vent n'agitait les feuilles, plus aucun murmure ne montait de la terre, plus aucun oiseau ne chantait. Et c'était comme ça à chaque fois. Sûrement fallait il que je m'y habitue, peut être fallait il que je m'adapte. Encore une fois. Plus de bruits d'explosions, plus de râles de souffrance, plus cette joie unique, ce plaisir si intense. J'adore ce bruit. L'explosion. J'adore la sensation qu'il procure, les tympans qui semblent le reconnaître à chaque fois, qui le savourent avec délectation. La plus belle explosion que j'ai jamais eue m'avait été procurée par une petite jument blanche. Elle s'apellait Dayla, ou Dalya. Alors que j'en avais fini avec un étalon alezan, une sorte de brute massive, j'avais vu cette délicate créature incendier d'un frôlement une jument grise. Il me la fallait. Il me la fallait absolument, là, tout de suite, à l'instant il fallait que j'entende de nouveau le bruit mélodieux. J'ai su quand je l'ai vue qu'elle m'apporterais le bruit le plus superbe du moment. Elle n'était pas assez prudente, je l'avais déjà observer auparavant, alors qu'elle jouait près d'une rivière avec mon frère. Elle tombait souvent à l'eau, elle ne faisait pas attention, et elle ne se méfiait pas lorsqu'elle voyait une ombre noire qui n'était autre que moi entre les roseaux. Il y avait aussi cet autre souvenir, les trois qui couraient dans la plaine, à la poursuite d'un gros lapin. J'étais dans un coin, adossé à un arbre je jurais que je me vengerais, alors que la voix de Seth résonnait paternellement dans ma tête, me demandant de me calmer. Lorsqu'ils avaient abandonné la partie, j'avais rattrapé le lapin et lui avait brisé la nuque. Donc c'était une sotte, mais une sotte à savourer. Je l'ai prise sur la gauche, j'ai frapper mes sabots, et j'ai entendu le magnifique bruit d'un de ces organes en train d'exploser. C'était superbe. Grandiose. Malheureusement, Saint Soran est arrivé, tout de blanc vêtu, et à sauver ma donzelle. Elle est encore vivante, elle est quelque part. Je veux la finir. Je déteste le travail mal fait, et je vais toujours au bout de mes idées. C'est un principe. Aussi je la cherches. Je sais qu'elle est quelque part.

Mes yeux dorés battirent quelques instants, et je tournais la tête dans un mouvement lent vers un arbre, qui sembla frémir alors que je l'approchais. Mes pas ne retentissaient pas sur le sol, je ne sentais même pas l'asphalte. Tout ce qui comptait, à présent, c'était ce petit arbre. Mon sabot effleura doucement, presque amoureusement, le tronc, et je sentais les multiples veines, la séve circuler trop rapidement. L'arbre avait peur, et il avait raison. Mais je ne voulais pas l'exploser. Une explosion ferait trop de bruit, je serais repéré par des sbires de Soran, ou pire, si un joujou ce promenait dans la forêt, je ne pourrais l'exploser. Un soupir agaçé brisa le silence, sifflant dans l'atmosphére, et une mèche noire, qui tombait devant l'un de mes yeux et chatouillait mon naseau, se souleva dans les airs, portée par mon inspiration. Je me détournais du hêtre, qui avait eu chaud, et marchais d'un pas élastique, les yeux vides ne regardant rien en particulier. Le silence régnait toujours, seul un nouvel élément, incongru, se manifesta. Bom, Bom. Dans un rythme lent, une sorte de valse de la mort, ma poitrine retentissait, mon coeur pulsait du sang rouge. Le leur était écarlate, le mien l'était devenu lorsqu'ils m'éclaboussaient. Mais la couleur de mon sang n'avait jamais été normale. Elle était intense, trop claire. Un rouge trop clair.

Soudainement, comme si c'était naturel, un daim jaillit d'entre deux arbres, ce planta à quelques mètres de moi, ses yeux bruns figés. Moi même, j'étais stupéfait. Jamais un animal vivant n'avait osé se mettre ainsi en face de moi, me défier avec autant d'aplomb. Un rictus sinistre tordit mon visage, je penchais la tête sur le côté, comme un enfant curieux. Aussi étrange que cela puisse paraître, oui, je sais sourire. Et même mieux que ça.
Le daim fit un pas en avant, vers moi, et souffla doucement, avant d'entrouvrir les lèvres :

-Tu es malade, One.

Bien. Si les daims parlent, à présent, nous nous exposons à de sérieux ennuis.

-Très Malade... Tu ne voudrais pas que je te guérisse ?

Avec un regard glacé, qui contrastait avec la couleur chaude de mes prunelles, je fis demi tour dans un virevoltement silencieux, reprenant ma marche.

-Tu ne pourras pas l'ignorer longtemps ! lança le daim, d'une voix harmonieuse.

Je remuai la queue en guise de réponse, avant de précipitament quitter le chemin, et de, sans bruit, épier de derrière un arbre ce qui s'approchait. Totalement invisible, j'attendais.
Je m'adapterais à cette longue attente aussi.

[Ouvert à tous, des anciennes victimes aux petits frères acariâtres ^^.]

[C'est bien, Ony est content ^^.]

Maussade, j'attendais derrière mon arbre, les yeux figés. Le vent n'était pas présent, personne ne détecterait mon odeur puisque je n'en avais pas. Par contre, elle en avait une. Et lorsque je la reconnus, ce fus comme si l'on avait allumé un feu d'artifice dans mon estomac. Estomaqué, j'étais enfin intéressé par quelque chose depuis des mois. Fébrilement, j'observais la route de terre, les yeux pétillants et un mince sourire fatigué aux lèvres. Etais je fatigué ? Non, je voulais juste en avoir l'air, c'était un masque facile à prendre, pas trop épuisant. Mes yeux, rendus mobiles, suivaient son parcours, et je trépignais presque d'impatience, pourtant toujours silencieux. L'espace d'un instant, je revoyais cette plaine d'herbe cassante ou les trois poulains couraient, la forme blanche se détachant des trois. Elle était floue, dans mes souvenirs, par ce que mes yeux étaient devenus humides. J'étais si sensible qu'un rien suffisait à l'époque. Puéril. Idiot.

Son odeur champêtre emplissait mes naseaux, mon cerveau déraillait vers chacun de mes souvenirs, vers le bruit de son explosion...
Le daim, qui jusque là était resté figé sur la route, s'avanca vers elle d'une démarche chaloupée. Qu'est qu'il lui voulait ? Elle est à moi... A MOI. On ne touche pas !
Les traits tirés, je pinçais les lèvres, tandis que le daim parlait de sa voix lente et grave :

-Tu ne l'as pas vu ?

Lassé par tout ces enfantillages, je fermais les yeux brutalement, laissé tomber ma tête contre ma poitrine. Pourquoi ne l'avais je pas exploser, ce lui là ?
Mon esprit devenait de plus en plus enfantin, je le sentais. Je me posais des questions que mon cerveau machinal n'aurait jamais imaginé à l'instant. Cette jument blanche était beaucoup trop troublante pour vivre longtemps. Je rouvris finalement les yeux, et les posaient avec ardeur sur son joli visage.

Elle l'avait enfin vu. Satisfait de sa mission, le daim s'éloigna d'une démarche chaloupée, et je le suivais du regard, passant ma langue sur mes lèvres. La jument blanche était crispée, avait couvert son corps autant qu'elle le pouvait, comme une femme pudique surprise dans le bain. Je haussai les sourcils, et un sourire clairement amusé retroussa mes lèvres. Abandonnant le masque fatigué, je pris le moqueur. Repéré, je sortis des broussailles d'une démarche féline, sans bruit. Mes yeux détaillaient le corps scultural de la jument. Lorsque je l'avais blessé, elle était à peine pubére, presque encore une enfant. Elle avait bien évolué depuis. Très bien évolué, jusqu'à en devenir magnifique. Mais je ne m'attachai pas à ce détail, seulement préoccupé par le bruti qu'elle ferait, lorsque ses particules d'atomess se disperseraient dans les airs. L'odeur des chaleurs de la jument, malgré tout ce qu'elle faisait pour les masquer, était néanmoins présente. Elle me distraya quelques instants, le parfum était assez doux mais ne provoqua aucune réaction en moi. Je n'étais pas très réactif sur ce plan là. Dalya avait l'air bien peureuse, soudain, presque minuscule. Un sourire carnassier s'étira sur mes lèvres, je ne faisais que sourire de différentes façons à longueur de temps, sans jamais révéler le vrai sourire.
Je me plantais face à elle, me remémorais son air paniqué, un peu pareil que celui là, lorsqu'elle avait compris ce qui arrivait à son ventre. Puis elle s'était écroulée, haletante, refusant de mourir. Ce qu'elle pouvait être agaçante.
J'étais planté face à elle, tout proche, mes sabots prêts à être entrechoqués. Je passais ma langue sur mes lèvres, levait un oeil vers le ciel bleu, avant de prendre enfin la parole.

<<Tu sais, je crois que tu te trompes sur mon compte. Je ne suis pas vraiment pervers, on m'a au moins épargné cela, alors, par pitié, cesse de cacher ainsi tes parties génitales, tu vas finir constipée. Ce serait dommage le jour de sa mort.

Je fermai un bref instant les yeux, faillis éclater de rire. Elle était étonnante. Passionante. C'était dommage de devoir la tuer si vite, dans cette forêt. J'aurais préféré un endroit plus dramatique, ou le bruit de son explosion retentirait bien. Malheureusement avec tout ces arbres. Agaçé, je soufflais de nouveau, envoyant valser ma mèche, en jetant un coup d'oeil de droite à gauche.

<< C'est charmant, cette opinion de moi.

J'avais souvent ce côté là, un brin gamin boudeur, qui ressortais. En parlant de gamins...

<< Tu es toujours amoureuse d'Amadeus ou tu es passé à autre chose ? Avoir mon petit frère adoré sous les bras après ça serait par trop désagréable... Et Soran aussi, je parie. Shhht... Il ne save pas apprécier les bonnes choses.

La jument c'était plaquée contre un arbre, l'écorce devait lui rentrer dans la peau. Bientôt, son sang sombre m'éclabousserait, et s'en serait fini d'elle. Je ne pourrais plus jamais revoir cette lueur paniquée dans ses yeux. La seule chose que l'on pouvait reprocher à une explosion, c'est qu'elle soit trop rapide. Pas le temps de savourer. Ni de faire joujou avec votre proie. Et il faut dire que j'avais face à moi une superbe poupée en procelaine. Je ne voudrais pas la salir en la violant...

<< Je ne suis pas d'humeur à ça et je vais t'apprendre un fait divers que tu pourras raconter aux petits anges en haut : Je ne violes jamais personne.

Je me rapprochais d'elle, pas après pas, l'ombre des arbres formant des mosaïques sur mon pelage sombre. Je m'arrêtais soudain, net, comme foudroyé, et demandais d'une voix injonctive :

<< Raconte moi comment c'était, lorsque tu étais enfant.

Cette forêt était belle, sans doute un peu trop humide... Moisissures et compagnie.

Eclipse s'immobilisa soudain, elle entendait des voix. Deux voix. Une effrayée qui tentait une ridicule menaçe et une moqueuse dans laquelle se dissimulait de la menaçe.
"Règlement de comptes a ce que je voit"
S'approchant doucement, ignorant volontairement le daim qui se tenait non loin de la, Eclipse écoutait

<< Raconte moi comment c'était, lorsque tu étais enfant.

Encore du sentimental, elle soupira discrètement.
Le daim s'approcha d'elle, les deux autres chevaux (une jument blanche et un étalon noir... pas trop mal) étaient trop occupés pour faire attention a elle.
Pourquoi un étalon voudrait tuer une jument ? A moins d'être sadique et méchant... Au moins, ce n'est pas un violeur.
L'étalon semblait a l'aise, ravi de voir la peur de sa victime "Tiens, il connait ça lui aussi." on aurais dit... un chat en train de jouer avec une souris.

Le daim commençait a l'agaçer "est-ce qu'il brulerait bien ?" Elle en doutait, de plus, l'odeur risqu'ait d'aleter les deux autres. Elle décida de le tolérer... pour l'instant.

Cachée parmis les feuillages, Eclipse attendait de voir la suite.